Ce blog est le support de la "recherche action" menée par la Fédération nationale de l'agriculture biologique depuis 2011, par et pour les paysans bio, pour penser et proposer les modèles conceptuels d'une "nouvelle économie de l'AB" en action.

dimanche 8 décembre 2013

les biens communs et l'économie sociale et solidaire


dec. 2013 un sujet en lien avec les débats de la recherche - action, vu sur le site de la RECMA

Une très intéressante journée sur l’économie sociale et solidaire a été organisée à Lille le 21 novembre dernier, avec des chercheurs, des étudiants, des élus et des acteurs régionaux et nationaux de l’ESS. Une table ronde portait sur l’éventualité de mettre la notion de biens communs au service de l’ESS et de ses réflexions sur sa propre « utilité sociale ». Jean Gadrey résume sa communication  (version longue)
Je pense en effet que cette notion de biens communs, encore peu connue en dehors de certains réseaux militants, peut « servir » l’ESS, en me gardant toutefois d’en faire la panacée. Je m’appuierai essentiellement sur des travaux collectifs engagés dans cette région, le Nord Pas de Calais, depuis plusieurs années, avec des acteurs très divers, parmi lesquels des chercheurs, dont Laurent Cordonnier qui a eu un rôle important.

Ma courte présentation a deux parties. D’abord, les biens communs (I), puis l’ESS, l’utilité sociale et les biens communs (II).

I. LES BIENS COMMUNS, essai de caractérisation en cinq points
1) Les biens communs désignent des qualités (j’insiste : on est dans une socio-économie de la qualité) de ressources ou patrimoines collectifs jugés fondamentaux, aujourd’hui et pour le futur (biens communs naturels, cultures populaires, connaissances…) et, par extension, des qualités sociétales et des droits universels car ce sont également des ressources collectives dont la qualité doit être gérée en commun (l’égalité des femmes et des hommes dans de nombreux domaines, la sécurité professionnelle des travailleurs, la santé publique…).
2) La qualification d’un enjeu comme bien commun n’a rien de naturel. Les biens communs sont des construits sociaux. Ils doivent être institués. Et c’est un combat, qui met en cause des régimes de propriété, d’appropriation et de responsabilité.
Les biens communs envisageables sont certes très hétérogènes et très nombreux à première vue. Mais leur mobilisation devient plus circonscrite et plus gérable dans des projets précis. Si par exemple on se pose la question, sur un territoire, de la conversion écologique et sociale de l’agriculture, ou de celle des logements, alors les acteurs concernés pourront aller plus vite à l’essentiel et identifier, après débat, un nombre limité de biens communs à préserver, instituer et gérer. Il en ira de même pour un projet associatif (partie II).
3) L’appellation de biens communs contient à la fois l’exigence d’intérêt commun, d’accessibilité pour tous, et l’idée que la gestion des biens communs est « commune », qu’elle passe par la coopération d’acteurs multiples. L’adjectif « public » tend à renvoyer à « pouvoirs publics ». L’adjectif « commun » renvoie à un pouvoir mis en commun. Voir l’annexe de la version longue de ce billet.
4) Les biens communs ne s’opposent pas aux biens privés. L’objectif par exemple d’une transition écologique et sociale bien menée devrait être non seulement de prendre soin de biens communs en tant que tels, comme la qualité de l’eau, de l’air, de la biodiversité ou de la protection sociale, mais surtout d’enrichir la production des biens privés en biens communs écologiques et sociaux via notamment des normes plus exigeantes (haute qualité sociale et environnementale).
Il s’agit même probablement de ce qui importe le plus pour l’emploi conçu comme un droit, autre bien commun. Car enrichir toutes les productions en biens communs, c’est-à-dire produire « plus propre, plus vert et plus social », exige en général plus de travail à quantités identiques que de prolonger les tendances productivistes actuelles, destructrices justement de biens communs.
5) Avec les biens communs comme qualités d’ordre collectif, on n’est plus dans une économie traditionnelle de « production », mais dans une économie du « prendre soin », y compris comme condition de la production de biens privés.
- PRENDRE SOIN DES PERSONNES et du travail ;
- PRENDRE SOIN DU LIEN SOCIAL et de droits universels ;
- PRENDRE SOIN DES CHOSES et des objets ;
- PRENDRE SOIN DE LA NATURE ;
- PRENDRE SOIN DE LA DÉMOCRATIE. C’est peut-être le premier des biens communs, ou le plus transversal.

II. ESS, UTILITÉ SOCIALE ET BIENS COMMUNS
 Je peux en venir à l’ESS et à la façon actuelle de réfléchir à ses propres projets en termes d’utilité sociale et écologique, des termes que je ne propose nullement d’abandonner, bien au contraire, on en a besoin, mais que l’on pourrait compléter et consolider.
 L’utilité sociale d’une organisation de l’ESS désigne, au-delà d’objectifs éventuels de production de biens et de services destinés à des usagers individuels, sa contribution à des objectifs collectifs (ou « bénéfices collectifs ») tels que :
- la réduction des inégalités et de l’exclusion ;
- le renforcement de la solidarité, du global au local, et la sociabilité ;
- l’amélioration des conditions collectives du développement humain durable (dont font partie l’éducation, la santé, la culture, l’environnement, et la démocratie).
On peut y ajouter les qualités démocratiques du mode de fonctionnement interne des associations, lorsqu’elles sont respectées, car elles ont un certain potentiel de diffusion et d’attraction, surtout dans une période de crise profonde de la démocratie.
De toute évidence, les bénéfices collectifs inclus dans la définition de l’utilité sociale ont beaucoup à voir avec des biens communs : c’est toute la collectivité concernée qui bénéficie de leur qualité, et c’est la délibération qui les institue comme bénéfices collectifs reconnus.
Ce qui peut subsister de différence dans les faits réside dans cette caractéristique centrale des biens communs : ils sont gérés en commun, par la coopération de parties prenantes diverses. Est-ce toujours le cas des bénéfices collectifs « produits » par les organisations de l’ESS ?
Dans les faits, il me semble que, dans l’état actuel des choses, certains de ces bénéfices collectifs de l’ESS ressemblent plus à des biens publics classiques qu’à des biens communs (voir l’annexe de la version longue de ce texte). C’est en particulier le cas lorsque des organisations de l’ESS deviennent des sous-traitantes de l’action sociale publique, ce qui est légitime et produit des résultats collectifs appréciables, mais sans introduire nécessairement dans leur gestion interne et surtout externe un degré de coparticipation suffisant pour que l’on puisse parler de biens communs issus de la coopération. C’est aussi le cas lorsque les bénéficiaires d’actions associatives deviennent des « destinataires » ou des « publics » dont les capacités d’intervention autonome sont peu sollicitées. 
Le fait de penser l’utilité sociale en termes de biens communs nous invite à renforcer, dans l’ESS elle-même, le modèle coopératif dont elle est issue, non seulement en interne, mais également en externe, en s’appuyant sur les capacités autonomes de ses parties prenantes à « coproduire » et cogérer cette utilité sociale. C’est déjà le cas dans une partie de l’ESS, mais, dans d’autres cas, c’est une stratégie en partie nouvelle de partage des responsabilités et donc du pouvoir de décision.

mardi 15 octobre 2013

Quel développement pour les filières bio?

Débat du salon "La terre est notre métier" le 11 octobre 2013, un événement du réseau FNAB

Avec Christophe Baron (Président de Biolait), Alain Delangle (secrétaire national Fnab), Jean-Jacques Le Bris (président section biologique du CERAFEL), Delphine Stroh (Carrefour développement durable ) et Guy Le Goec (Carrefour Cesson Sévigné), Jean-Paul Kerjean (Biocoop)


vendredi 4 octobre 2013

changer d'échelle?

un article d'Hugues Sibille sur le sujet du changement d'échelle de l'ESS: ici

une action publique capable de reconnaitre le bien commun à partir des intérêts privés?

Le projet de la "nouvelle économie bio" (termes en débat) est celui de l'organisation économique de producteurs qui cherchent à dépasser leurs intérêts privés pour celui, collectif, de la profession d'agrobiologiste et celui, général, de sujets de bien commun (territoires, environnement, alimentation etc.). De fait, ce projet croise la sphère des politiques publiques et des dispositions qu'elle peut prendre pour soutenir l'action des acteurs de terrain. On peut ainsi mettre en perspective les futurs GIEE (groupements d'intérêts économiques et environnementaux) reconnus dans la future loi d'avenir de l'agriculture et actuellement débattus au ministère de l'agriculture.

En quoi les producteurs bio sont concernés par cette action? en quoi renforcerait-elle le projet de la nouvelle économie bio? en quoi représente t-elle une action publique à la hauteur des enjeux de la transition écologique des pratiques agricoles qu'elle est censée faire advenir?

Sans entrer dans les détails de ce dispositif somme toute très simple (des paysans se regroupent dans un projet de double performance économique et environnementale labellisé par l'Etat et ouvrant droit à des bonifications d'aides et un conseil ad hoc), nous pouvons relever qu'il procède d'une volonté de déblocage du cadre institutionnel agricole sur ces sujets à partir de la volonté générale exprimés par des acteurs de terrain, pourtant acteurs économiques censés maximiser leurs intérêts personnels.

Cet exemple  fait largement écho à l'analyse du sociologue Bruno Latour (ci-dessus) sur le besoin d'une "modernité renouvelée" de l'action publique en France. Citation: "Les Français ont, chevillée au corps, cette idée que l'Etat est la sphère à l'intérieur de laquelle tout doit ou peut se régler. Cela n'est pas forcément faux. Mais alors il faudrait équiper l'Etat pour qu'il puisse expérimenter et produire la volonté générale, et non qu'il se contente de la présupposer. Si on prétend connaître à l'avance la différence entre les intérêts privés et le bien public, on n'arrivera à rien. Cette différence, il faut l'explorer, et c'est affreusement difficile".

Les GIEE devraient bien représenter cet "instrument de palpation de la volonté générale" dont l'Etat se dote pour penser et organiser la mobilisation des acteurs dans la transition écologique. Pourront-ils être instruits et relayés au sein de l'Etat et des instances de co-gestion existantes en gardant cet objectif de transition?

Bruno Latour, sur un plan plus général, s'interroge sur le décalage entre la gravité des problèmes environnementaux  et la prise de conscience publique de ces questions: "En France s'était créée une association merveilleuse entre la confiance dans la science, l'esprit républicain et l'idée de modernisation. le sentiment général qui prévaut est donc que "ça va s'arranger et que, de toute manière, on n'a pas d'autre modèle"."

L'exercice "affreusement difficile" de produire du bien commun à partir d'intérêts privés dépend donc d'un nouveau paradigme d'action publique associant nouveaux acteurs (dont la société civile) et nouvelles procédures (dont moyens de l'expérimentation et moyens de l'accompagnement par les sciences sociales). C'est bien, par analogie, le but de cette recherche action avec les producteurs bio. Espérons que le cadre des futurs GIEE laissera la place à cette "modernité retrouvée" qu'appelle de ses voeux le sociologue dans l'organisation de l'Etat face à la situation révolutionnaire de traiter l'urgence écologique.
julien Adda

vendredi 19 juillet 2013

Vers un « renouveau productif ? » (PTCE)



Le pôle sud d’économie sociale etsolidaire basé à Romans dans la Drôme accueillait une journée nationale le 11 juillet 2013 sur les pôles territoriaux de coopération économique (PTCE). Ce concept a été lancé en 2009 par des acteurs de l’économie sociale et solidaire dont la fédération Coorace (insertion par l’activité économique), le labo de l’économie sociale et solidaire (think tank) etc. en adaptation à la seule approche des pôles de compétitivité d’entreprises classiques qui cherchent ainsi à atteindre des « masses critiques suffisantes pour acquérir ou développer une visibilité internationale». 

Christophe Chevalier (Archer)

Le projet de l’économie de la coopération sur un territoire soutenu par l’Etat
Le pôle de coopération et de non de compétitivité se définit comme un groupement d’acteurs sur un territoire – entreprises et acteurs de l’économie sociale et solidaire associés à des petites et moyennes entreprises, collectivités locales, centres de recherche et organismes de formation – qui met en œuvre une stratégie commune et continue, de coopération et de mutualisation, au service de projets économiques innovants de développement local durable. On retrouve là la problématique de la recherche action de la FNAB et sa question de recherche[1] : « Quels modes d’organisation des producteurs pour accompagner le changement d’échelle de l’agriculture biologique et permettre une économie agro-alimentaire relocalisée, durable et équitable ? ». L’agriculture biologique est bien mentionnée par ailleurs comme un de secteurs concernés par cette démarche de PTCE.

Avec les PTCE comme avec les démarches inter organisations économiques de producteurs bio (OEPB) analysée par la recherche action de la FNAB, l’enjeu est à la fois économique, organisationnel et politique. Il s’agit en effet d’identifier et de reconnaitre des initiatives locales de coopération pour la transformation sociale et la transition écologique de notre économie territoriale. 

Premier débat récurrent mais indispensable  pour la compréhension commune, celui de la définition du territoire. Les participants ont rappelé que pour l’entreprise classique, dans une logique marketing, le territoire c’est son « produit » bien que les entrepreneurs reconnaissent leur attachement, parfois, au territoire social, culturel, historique dans lequel ils font économie. Dans la logique de l’économie sociale et solidaire, l’approche territoriale est évidemment multidimensionnelle dès le départ comme en témoigne le PTCE porté par le groupe Archer à Romans qui s’est ouvert aux PME locales pour des actions liées aux besoins avérés ou insatisfaits du territoire. Philippe Drésin le maire de la ville et président de la communauté de communes se reconnait dans ce mode « projet co-construit »: quand le PDG d’Archer vient me voir, il me dit qu’est-ce qu’on pourrait développer ensemble sur ce territoire, ce n’est pas le discours d’un entrepreneur qui me dit je vais créer 70 emplois qu’est-ce que vous faites pour moi ? ». On est bien là dans une communauté de destins partagés plutôt que de la définition de territoires plus ou moins compétitifs selon l’accueil qu’ils réservent à l’implantation des entreprises.

 Claude Alphandéry (Le Labo ESS)

Pour Claude Alphandéry, président du labo de l’économie sociale et solidaire, notre société en crise est d’abord celle d’un modèle économique et social qui abime l’Humain et détruit la nature. C’est une crise profonde. Pour l’ancien résistant, « il faut réagir, agir et ne pas rater notre coup ». Il invite les acteurs de l’économie sociale et solidaire à se saisir de l’appel à projet[2] de l’administration du ministère de Benoit Hamon et de Cécile Duflot pour les futurs PTCE.[3]

Mais pourquoi donc vouloir faire un PTCE quand on est un entrepreneur ?
En termes de politiques publiques, on voit bien « l’enjeu filière » qu’il y a à articuler le soutien PTCE avec celui des agences de l’eau par exemple et des collectivités. Y aura-t-il pour autant des projets structurés et structurants pour aller ensuite chercher des investissements stratégiques de l’Etat ? Créer une SCIC, relier des acteurs économiques et/ou institutionnels, se référer à des politiques publiques suffit-il ? Quid d’un modèle économique de la coopération économique et de la co-production des politiques de développement local ? Christophe Chevallier, PDG d’Archer a bien rappelé que son entreprise est la force motrice du PTCE ce qui est aussi sa faiblesse en l’absence d’autres entreprises porteuses, le risque est grand par ailleurs de supporter seul l’ingénierie et l’innovation pour le PTCE sans perdre de vue la rentabilité de sa propre entreprise… de fait, le modèle économique du PTCE n’est toujours pas établi. Quid aussi des impacts réels de cette coopération économique sur la création d’emplois, l’insertion sociale et le développement durable ? 

Du coup, les entrepreneurs présents à cette réunion insistent sur l’objectivation pour l’entrepreneur des intérêts à entrer dans la coopération territoriale. Ils mettent en évidence les risques d’institutionnalisation de ces PTCE dès lors qu’ils prennent une dimension législative et qu’ils passent sous les fourches caudines de la labellisation et de la normalisation…

 Hugues Sibille (Avise)

Faire de la coopération économique, c’est avant tout pour la durabilité de son activité, un modèle économique « charges/produits » dans la durée pour Hugues Sibille, Président de l’Avise, qui doit permettre des impacts sociaux et environnementaux et générer des hybridations de ressources publiques – privées (en liens avec les politiques publiques). Difficile en effet tout seul d’inscrire sa stratégie d’entreprise dans cette complexité des opportunités et contraintes des politiques de développement économique local. 

En ce sens, la fonction « recherche et développement » territoriale générée par le PTCE est reconnue comme une fonction légitime puisque nécessairement coopérative pour exister.  Autre exemple avec la coopérative agricole des fermes de Figeac qui a co-construit une coopération territoriale sur la gestion prévisionnelle des emplois et compétences (GPEC) en réponse au problème de main d’œuvre qualifiée et d’une population active vieillissante en milieu rural. Cet exemple témoigne d’un intérêt économique « à faire commerce ensemble » en distribuant les produits d’autres territoires organisés (exemple chaussures de Romans et produits du terroir de Midi-Pyrénées). 

Cette fonction « plate forme » entre entreprises permet aux entrepreneurs de sortir de leurs boites et d’investir ensemble les enjeux de la gouvernance locale d’une manière plus organisée et stratégique (dont Pays et son conseil de développement). Philippe Drésin que cette coopération territoriale permet ainsi de structurer une vision éthique convergente entre élus et entreprises. Force est de constater selon lui que nombre d’élus, de droite comme de gauche, sont agacés par l’économie sociale et solidaire qu’ils connaissent mal et qui vient heurter le modèle dominant qu’ils ont en tête, du coup un PTCE « institutionnalisé » devient un moyen de reconnaissance pour les acteurs. Mais pour Pierre Grosset, pdg de Juratri et conseiller régional, cette démarche ne doit pas être « moralisatrice » vis-à-vis de l’autre économie, comme parée d’une vertu intrinsèque… 

Michel Adam (Le Labo ESS)
Enfin, le PTCE devient utile comme un outil d’évaluation des démarches coopératives. Michel Adam a présenté le référentiel d’analyse (une 35ème version ?) autour de 3 objectifs généraux (le territoire, les processus coopératifs, l’économie intégrée qui rappellent le modèle de la recherche action FNAB avec le territoire, les acteurs, les projets), 9 principes et 36 indicateurs qu’il anime dans les PTCE existants. On peut ainsi trouver 10 indicateurs sur 36 relatifs à l’environnement, 11 sur 36 à l’emploi. La phase d’appropriation par les acteurs du référentiel nécessite forcément une intervention ad hoc de l’évaluateur pour permettre ce dialogue constructif entre les acteurs du PTCE et entre PTCE.

Le plan d’action national 2013-14 a dégagé un axe de travail sur la contribution des PTCE à la sauvegarde et création d’activités économiques dans le cadre du redressement productif. Le LABO de l’ESS et COORACE en partenariat avec Pôle SUD ARCHER ont souhaité tout particulièrement soutenir le développement de PTCE que l’on peut qualifier de « PTCE redressement productif ». Cette journée du comité de pilotage des PTCE Montebourgien fut aussi l’occasion d’un débat sur le sens des mots. Si la dimension productive est toujours là, les participants ont préféré rebaptiser cette démarche du terme de « renouveau », une bonne idée tant les finalités sociales et environnementales des PTCE semblent éloignées des objectifs du ministre en matière de transition énergétique.

Le réseau FNAB et les OEPB qui gravitent autour sont invités à s'emparer de cette démarche pour compléter la liste des PTCE et faire exister ceux de la "filière bio" au sens large. L'appel à projet des ministres peut nous aider à concrétiser ces démarches empiriques de coopération économique.
julien Adda, délégué général FNAB



[3] Article 6 du projet de loi sur l’économie sociale et solidaire : « il s’agit d’asseoir juridiquement la compétence de l’Etat pour reconnaitre et soutenir ces « clusters » innovants socialement et économiquement que sont les PTCE et qui se distinguent des grappes d’entreprises classiques non seulement par l’hybridation entre les structures de l’économie sociale et solidaire et les entreprises privées lucratives, mais également par la stratégie de mutualisation qui les anime, au service de l’utilité sociale et du développement durable ».

jeudi 30 mai 2013

présentation des résultats de la recherche action (première phase)


Présentation de la recherche action sur la nouvelle économie bio le 21 mai 2013 à AgroParisTech: pourquoi une recherche action associant paysans bio et chercheurs? Quelles questions de recherche pour engager une stratégie sur le changement d'échelle de la bio? Quelles réalités existantes répondent à cette nouvelle gouvernance agroalimentaire territorialisée, durable et équitable? Avec Ronan Le Velly (INRA), Tony Chocardelle, Alain Delangle et Claire Touret (FNAB).


lundi 27 mai 2013

Séminaire du 21 mai, conclusion de Jean-Marc Meynard

Jean-Marc Meynard, directeur scientifique à l'INRA et président de la commission bio de Coop de France a conclu les travaux du séminaire du 21 mai 2013



table ronde de réactions à la présentation des résultats de la recherche action

Lors du séminaire du 21 mai 2013, une table ronde experte a régi à la présentation des résultats de cette première phase:

Jean-Marc Meynard, directeur scientifique à l'INRA et président du CSAB

 
Christophe Lécuyer, Président de la Commission bio de Coop de France



Hugues Sibille, vice président du crédit coopératif



Nouvelle Économie Bio : Changer d’échelle ? par Hugues Sibille

H.Sibille, Vice Président du Crédit Coopératif (avec le micro)

Nouvelle Économie Bio : Changer d’échelle ?

 

voir sa vidéo:

jeudi 23 mai 2013

La nouvelle économie bio en débat – séminaire FNAB du 21 mai 2013


Mardi 21 mai 2013, un séminaire de partage et de débat autour des résultats de la première phase de la recherche action sur la nouvelle économie bio s’est tenu à Paris. Plus de 100 personnes étaient présentes, opérateurs impliqués dans les filières bio, des producteurs aux distributeurs, et acteurs de l’économie sociale et solidaire. Chercheurs et collectivités territoriales était aussi représentés ainsi que les services du Ministère de l’agriculture.

À cette occasion, les producteurs bio ont partagé leur démarche et les enjeux qui y sont liés. Ronan Le Velly, maitre de conférence en sociologie UMR innovation INRA SAD, a souligné la pertinence de cette approche dans le cadre d’un changement d’échelle en illustrant, au travers de l’exemple de la Californie, les risques liés de mise en concurrence des acteurs et les impacts potentiels sur l’agriculture biologique, notamment avec la dégradation des systèmes de production et la perte de biodiversité. Cet exemple extrême a le mérite de clarifier les interactions existantes entre conditions de commercialisation et mode de production.

Les concepts retenus et le modèle d’analyse des innovations organisationnelles des structures économiques de producteurs bio ont été exposés. Aux deux concepts clés développés, diversité et interdépendance, Jean-Marc Meynard, Président du Conseil Scientifique de l’AB nous conseille d’ajouter celui des transitions socio-techniques. Il permet d’appréhender les mécanismes de transition d’une économie de niche à un nouveau modèle et particulièrement l’hybridation aux modèles dominants.

C.Baron (Biolait) et E.Teillet (Système U)
De nombreux exemples ont la pertinence du modèle d’analyse et montré comment les producteurs bio entraient en interaction avec des partenaires nombreux et variés pour partager un projet éthique, économique tout au tant que social et environnemental :

·         Témoignages sur la construction de partenariats avec des acteurs classiques des filières en décloisonnant les relations entre les parties prenantes et surtout en instaurant la transparence, la confiance et la durabilité des échanges : le témoignage d’Eric Teillet, chef de groupe pour le développement de produits frais à système U, a souligné ces mots clef et l’importance des relations humaines,
·         Témoignages sur la concertation et coopération avec des structures d’insertion et des collectivités territoriales.

G.Bernier et J-F.Caron (micro)
Sur l’implication des collectivités territoriales, Jean-François Caron, Maire de Loos-en-Gohelle, nous a démontré l’importance de créer un terreau fertile, d’impulser des changements culturels pour instaurer la confiance et une culture de l’innovation à l’aide d’une approche démocratique réellement participative, basée sur l’acquisition collective de savoir. Pour les collectivités vouloir accompagner la bio est souvent acquis mais savoir comment le faire avec l’adhésion des habitants reste une question complexe.

Jean-Marc Meynard a souligné l’intérêt et la pertinence de la démarche, des concepts et du travail réalisé. Il nous encourage à aller plus loin dans l’analyse pour tirer des enseignements génériques et émettre des préconisations pour les politiques publiques à venir. Il invite également à mobiliser davantage les chercheurs, pour analyser ces expériences, étudier des cas d’échecs et la façon dont les acteurs bio abordent ce changement d’échelle dans la construction des filières, à l’étranger notamment chez nos voisins européens.
J-M.Meynard et H.Sibille (micro)

Hugues Sibille, Vice-président du Crédit Coopératif, a souligné l’importance de la biodiversité économique des territoires. Il nous a fait part de son expérience en nous précisant quelques points de vigilance pour changer d’échelle sans perdre son âme : 

-          Mener la bataille des idées, porter un message clair auprès des décisionnaires pour obtenir les financements de l’animation nécessaire à l’accompagnement d’un changement d’échelle, et aussi faire des propositions législatives,
-          Veiller à la gouvernance des entreprises et des territoires, et ne pas hésiter à « re convoquer le projet »
-           Construire des critères d’impacts socio-économiques pertinents et partagés.

Christophe Lecuyer, nouveau président de la Commission bio de Coop de France, a expliqué la diversité des structures de cette commission et l’intérêt des échanges entre des coopératives ayant une activité dédiée à la bio et celles n’ayant qu’une faible part de leur activité sur ce secteur pour initier partout une dynamique bio.

Gérard Schrepfer (à gauche), représentant Conso France, chargé de mission pour l’association Léo Lagrange, nous a livré une analyse très objective de la vision des consommateurs et a insisté sur l’intérêt d’amplifier les échanges pour donner des repères, notamment aux consommateurs urbains qui sont déconnectés des réalités agricoles. L’association Léo Lagrange conçoit que les produits biologiques notamment par leur impact sur l’emploi dans les territoires soit plus couteux que les produits conventionnels. Par contre, il faut l’expliquer aux consommateurs, accompagner une révolution culturelle autour de l’agriculture et de l’alimentation plutôt que d’assommer les consommateurs de publicité basée sur des prix bas.  

Elisabeth Mercier, Directrice de l’Agence Bio, a répondu avec intérêt à cette nécessité de mieux communiquer et échanger avec les différentes associations de consommateurs. Elle a proposé un travail plus approfondie avec l’association Léo Lagrange et retenue l’importance de travailler en direct avec les différentes associations de consommateurs vu la diversité de leur sensibilité. Elle a aussi proposé que la mise en œuvre du plan bio s’inspire largement de la méthode de recherche action appliquée ici, pour laquelle acteurs bio et chercheurs seraient directement impliqués dans le suivi et l’évolution du plan bio !

Ce séminaire était une première étape d’ouverture de la recherche action en invitant un plus large public. C’est maintenant le début d’une nouvelle phase ; celle-ci doit se poursuivre en intégrant d’autres acteurs des filières et des territoires, et en développant des partenariats plus étroits avec les chercheurs afin qu’ils puissent investir les champs complémentaires que nous ne pouvons mener seuls (comparaison internationale notamment).

jeudi 18 avril 2013

Enjeux de la future loi d'avenir de l'agriculture

Le CGAAER (conseil général du ministère de l'agriculture) a publié une note dans le cadre du lancement de la concertation officielle sur la future loi d'avenir de l'agriculture.
Cette note montre bien l'écheveau de contradictions dans lequel se pense aujourd'hui la politique économique agricole et le défi posé au législateur:

"Certes l’agriculture française a atteint l’objectif d’autosuffisance assigné par la PAC et son
chiffre d’affaires excédentaire s’inscrit au 4éme rang mondial. Pour autant, l’examen de l’évolution du corpus législatif relatif à l’activité agricole et forestière depuis 1960 incitent à se poser les questions des rôles impartis à l'agriculture dans les prochaines décennies :
Quelle agriculture ou quelles agricultures souhaitée(s) en termes économique, sociétal et avec quels outils législatifs et réglementaires?"
 
Dès lors, le CGAAER envisage de la transversalité dans les politiques publiques agricoles (santé, alimentation, territoires etc.) et de l'innovation dans l'organisation économique (groupement d'intérêt économique et environnementaux), c'est l'économie sociale et solidaire qui est reconnue dans ses outils de gouvernance:

"Les groupes d'intérêt économique et écologique (GIEE) regrouperont des agriculteurs, sur une base volontaire, autour d'un projet visant à faire évoluer leurs pratiques voire à développer de nouvelles activités. Afin d'optimiser les effets de la mutualisation des expériences, les groupes devront rester à « taille humaine » sans que la continuité géographique ne soit imposée. Les GIEE devront se déployer via des partenariats avec les acteurs des territoires et des filières afin de trouver les débouchés aux productions et chercher à valoriser via le produit la performance environnementale. Un financement public pourra prendre en charge une part des coûts de conseil et d'animation voire aller jusqu'à leur dédier une partie des aides du second pilier sur des mesures d'investissements ou des MAE. La labellisation GIEE pourra concerner des groupes d'agriculteurs existants réunis autour d'une activité de mutualisation de conseil (CETA, GEDA) ou d'une structure de mise en commun de matériel (CUMA) dès lors qu'une dynamique vers la double performance est avérée. Des structures assurant la gestion collective de certains territoires comme les ASA ou Associations Pastorales pourraient également y prétendre. Enfin, des structures juridiques qui existent dans d'autres secteurs d'activité mais restent peu communes en agriculture pourraient être développées comme les SCOP (pour le développement d'activité sur la base d'une exploitation existante par la mise en commun d'une partie des infrastructures nécessaires avec un partage de risque équilibré entre l'agriculteur existant et le nouveau) ou surtout les SCIC (qui rassemble des exploitations et une collectivité pour organiser l'approvisionnement alimentaire ou en énergie renouvelable)."
 
Il y a là une perspective intéressante de reconnaissance des organisations économiques de producteurs bio (OEPB), au cœur du modèle de notre "nouvelle économie bio", qui ont bien pour but de concilier un objectif économique de rentabilité dans le cadre d'objectifs environnementaux (agriculture biologique) et sociétaux (territoires, santé, alimentation) avérés. C'est notamment le cas pour les SCIC créées pour l’approvisionnement de la restauration collective en produits bio locaux. L'analyse de la gouvernance de ces structures innovantes montre bien qu'il faut les soutenir sur le plan de l'animation dans la mesure où la gestion économique quotidienne rend difficile l'animation d'une gouvernance élargie, censée aussi guider le pilotage économique.
voir le site repasbio.org